ANATAHAN
Du 05/09/2018 au 24/09/2018
D'après le roman de Michiro Maruyama
1944. Alors que la guerre bat son plein, une douzaine de soldats japonais échouent sur l’île d’Anatahan. Après quelques jours, les rescapés découvrent un village dans lequel résident seuls Kusakabe et une jeune femme qui semble être son épouse. Durant sept ans, ils vont apprendre à survivre « bloqués » dans cette jungle superbe mais vicieuse, à se nourrir, et même à y fabriquer de l'alcool. Mais là n'est pas le sujet du film... Ignorant la défaite du Japon puis refusant d’y croire, attendant l’arrivée d’un ennemi qui ne viendra plus, ces anciens marines vont se défaire des contraintes sociales et se déclarer la guerre pour la possession de Keiko, l’unique femme à leur portée autour de laquelle tournent toutes les folies. Peu à peu, instincts et pulsions sexuelles vont prendre le dessus et les transformer en hommes des cavernes, à l'état primitif, puis esclaves de celle surnommée désormais « La reine des abeilles ». Aveuglés par le pouvoir, la fierté et la volonté de destruction, il leur devient impossible de revenir vaincus et de renoncer au cauchemar de la guerre.
Dans un studio construit pour le film à Kyoto, le réalisateur de L'ange bleu et pygmalion de Marlène Dietrich nous propose avec Anatahan – très mal reçu à sa sortie – « un post scriptum au conflit du Pacifique ». Inspirée de faits réels, l'histoire de ces oubliés du monde accueillis en héros est racontée comme un conte philosophique. Dès le début, le narrateur – Von Sternberg lui-même – reconstitue les faits et annonce plusieurs avertissements, augmentant de plus belle la tension. Cette voix-off aussi sublime que caustique a une importance essentielle : les dialogues entre les personnages n’étant volontairement pas sous-titrés, c’est elle qui raconte toute cette histoire au passé ou traduit simultanément les échanges des acteurs... « Juger le passé c'est autre chose que de le vivre » : du grand art, d'une beauté envoûtante !