DERNIÈRES NOUVELLES DU COSMOS
Du 09/11/2016 au 05/12/2016
En partenariat avec la librairie Floury, le livre Algorithme éponyme de Babouillec Sp sera en vente à la caisse du cinéma.
« Et nous les faiseurs du monde dans ce dédale arbitraire, sommes-nous libres, amicalement reliés, ignorants des autres ou dans la file d’attente des cerveaux débranchés ? Nous survivons par l’instinct de survie. Seul l’acte d’aimer nous sépare du vide. Halte à la montée en puissance des têtes endormies (...). Maîtres de l’univers, dinosaures y compris, l’homo-sapiens taille la route littéralement soumis à l’éternelle question : qui suis-je ? Être ou ne pas être, là est la question. Dire merde à ceux qui croient savoir, là est la réponse. Mystérieusement les soifs d’aventures s’auto-censurent. »
Ces mots sont issus du spectacle Forbidden di sporgersi, créé à partir du texte Algorithme éponyme écrit par Babouillec Sp à laquelle Julie Bertuccelli a décidé de consacrer ce magnifique documentaire. Ce qui frappe d’abord, c’est la puissance de ces phrases, la beauté d’une écriture qui paraît d’une liberté totale. Or l’auteur de ces textes, qui s’est elle-même surnommée Babouillec Sp (Sp pour sans parole) et qui s’appelle Hélène Nicolas, a été diagnostiquée autiste très déficitaire et n’a notamment pas accès à la parole, ni l’habilité motrice suffisante pour écrire : « J’ai traversé de longues années coupée du monde du dire. Impossible pour moi d’entrer en relation avec les codes établis. Un mutisme s’est emparé de mon corps, mon intelligence mentale est enfermée dans ce corps du silence ».
Peu à peu, avec l’aide de sa mère Véronique et un travail quotidien partagé, Hélène s’est ouverte au monde. Elles ont ensemble découvert la possibilité pour Hélène de s’exprimer à l’aide d’un alphabet de petites lettres cartonnées et plastifiées qu’elle assemble patiemment. Grâce à ce stratagème, Hélène nous a ouvert son univers. Elle a écrit – petite lettre par petite lettre – plusieurs livres, et travaille à des créations littéraires orientées vers le spectacle vivant.
C’est cette incroyable aventure que capte Julie Bertuccelli. Elle suit Hélène dans son patient travail d’écriture, puis dans la création avec Pierre Meunier du spectacle Forbidden di sporgersi, d’après ses propres textes. Elle assiste aux « discussions » d’Hélène avec des journalistes curieux ou avec un mathématicien reconnu. Elle nous fait découvrir un personnage incroyablement attachant et à la volonté hors du commun. Son film est une formidable leçon de vie, et nous ne saurions en parler mieux que Babouillec elle-même :
« Avec le recul mon œil a retrouvé son sens critique. La beauté que dégage l’image nous offre la possible interrogation de l’émotion. Rire ou pleurer face à ce monde d’un ailleurs. Vrai sujet de société, parler de l’autisme peut déranger. À travers ton film Julie, j’apparais comme une personne hors circuit qui avec sa boite de lettres compose un langage d’une autre appartenance et les mondes se rejoignent. Avec plaisir je m’observe dans ton œil goguenard habité par l’amour de la lumière directe, fluide, embellissant les contours poétiques du réel. Abracadabra et saperlipopette, j’adore ce magique instant de l’éternité dans lequel, le regard, l’émotion, le corps tout entier s’immobilisent. Je crois que cette étrange alchimie de l’instant pour l’éternité m’enseigne la confiance dans l’existence d’être quelqu’un quelque part dans un espace de partage. Alors merci Julie d’avoir embarqué avec moi dans ce monde d’un ailleurs que tu appelles Dernières nouvelles du cosmos ».