DU SILENCE ET DES OMBRES

La sortie de Loving de Jeff Nichols est une merveilleuse occasion de redécouvrir en salle Du silence et des ombres. Dans une petite ville du Sud des États-Unis, au début des années 30, un avocat accepte de défendre un homme noir accusé à tort d’avoir violé une femme blanche. Le film met en scène les deux enfants de cet avocat, soudainement confrontés au monde adulte et à ses injustices.

Atticus Finch, le personnage interprété par Gregory Peck, incarne la foi inébranlable dans le droit comme régulateur de la société et dans un système judiciaire censé donner à tout citoyen les mêmes chances. Il fait face – avec la sérénité qu’implique la certitude de servir une juste cause – à une foule prête à lyncher un homme sans autre forme de procès et doit affronter des situations douloureuses, dans lesquelles l’application du droit n’est plus le meilleur moyen de faire prévaloir la justice véritable…

En contrepoint de cet aspect « judiciaire », le vrai trésor du film est la peinture de l’enfance que le cinéaste magnifie. Il parvient à éviter la mièvrerie et l’émotion au rabais, par la vivacité et la spontanéité de toutes les séquences où les enfants en vacances s’inventent, à partir du réel, un monde imaginaire qui anime leurs journées. Il est question de terreurs enfantines, d’objets insolites trouvés dans le creux d’un arbre et précieusement conservés dans une boîte à trésors que nous fait découvrir le beau générique (à ne pas rater donc). La présence du merveilleux, les liens fraternels des deux jeunes héros, et plus encore l’importance de la figure du père nous renvoient inévitablement à La nuit du chasseur, autre chef-d’œuvre intemporel.