UN CORPS SOUS LA LAVE

1492. Alors que les caravelles de Christophe Colomb avancent vers l'inconnu, trois hommes s'échappent par la mer, emportant avec eux une voile censée assurer leur évasion. Ils échouent sur les rochers des îles Canaries et entreprennent une longue marche, difficile et incertaine. Ils sont rapidement poursuivis par ceux qui étaient jusque-là leurs compagnons, missionnés pour récupérer la précieuse pièce de tissu. Ailleurs, sur le « vieux continent », une femme tente de sauver sa soeur agonisante en l’amenant voir une guérisseuse...

Le film s'ouvre sur des corps ballotés par les vagues, comme pour annoncer l'expérience qui nous attend en tant que spectateur : préparez-vous à perdre vos repères et à vous laisser emporter pas le flot des images... Venus des arts plastiques, Helena Girón et Samuel M. Delgado préfèrent les sensations aux explications : pour nous conter la part sombre de la découverte des Amériques, ils nous plongent dans une atmosphère étrange, aride et silencieuse, hantée par la mort. En marge de la gloire des conquérants et de l'épique de leurs expéditions, Un corps sous la lave suit le périple lent et laborieux des oubliés de l'Histoire, ceux qui l'ont fuie comme celles qui l'ont subie. À rebours du film d'aventures, Un corps sous la lave choisit la radicalité comme mode d'expression : il s'en dégage une menace sourde, une poésie brute et énigmatique. En y insérant des images d'archives et des extraits d'un film franquiste exaltant la figure du colonisateur, il s'ouvre à une remise en question du récit historique : une expérience exigeante, certes, mais aussi âpre qu'intéressante.