Kerity, la maison des contes
Du 15/06/2016 au 15/06/2016
Alors que j’allais à la projection presse de Kerity, la maison des contes, je croise une copine auteur de livres pour enfants. « Ah ! génial, tu vas à la projection du dessin animé illustré par Rebecca Dautremer ? — Euh… mais c’est qui, Rebecca Dautremer ? Une dessinatrice de bateaux à voile ? — Mais non gros bêta, Rebecca Dautremer, c’est la Michel-Ange de l’illustration pour enfants, avec plein de best-sellers magnifiques à son actif ! ».
Et soudain la honte me gagne, moi qui cède quotidiennement à mes garçons en leur montrant les pauvres dessins de Dragonball Z, cette série qui hypnotise de manière incompréhensible des générations successives d’enfants à partir d’un scénario débilissime de guerriers qui s’affrontent aux quatre coins de l’espace…
La honte me gagne encore plus quand je découvre les premières images de Kerity… On est frappé immédiatement par la beauté et la poésie des images, évoquant la délicatesse des chefs d’œuvre de Miyazaki, Kerity faisant, avec son ambiance de bord de mer, irrésistiblement penser à Ponyo sur la falaise. Et en plus Kerity est le cadeau rêvé pour les parents ou les instits qui s’angoissent pour leurs schtroumpfs en proie à des difficultés de lecture, ou qui souhaitent entretenir le talent de leurs petits génies pour l’engloutissage de jolis livres.
Le point de départ de cette superbe histoire est l’arrivée de la famille de Natanaël, 6 ans (ses parents, sa grande sœur, cette peste d’Angelica) dans la maison reçue en héritage d’une grand-tante récemment disparue, une de ces maisons de charme toutes de guingois avec leurs souvenirs et leurs secrets, plantée au bord d’une falaise. Avant de mourir, la vieille Éléonore a laissé pour chaque enfant un cadeau : pour Angelica, une étrange poupée de porcelaine ; et pour Natanaël, la clé de la pièce mystérieuse qui s’avère être une immense bibliothèque remplie d’éditions originales des plus beaux contes.
Mais Natanaël n’en a que faire : il n’arrive pas à lire correctement… Et quand ses parents ont besoin d’argent pour financer les travaux de rénovation, il ne s’oppose aucunement à ce que le brocanteur du coin, Monsieur Pictou, rachète l’intégralité de la bibliothèque. Sauf qu’entre temps, il découvre que les livres sont habités par leurs personnages : Alice, Le Chat botté, Pinocchio et son maître Gepetto, le Chaperon rouge et son copain le Grand Méchant Loup (depuis le temps qu’ils se côtoient dans un livre, ils ont fini par être amis), la Fée Carabosse qu’on oublie tout le temps… Alors Natanaël comprend que sa vieille tante lui a donné pour mission de faire survivre les personnages des contes. Mais pour cela, il doit parvenir à lire une formule magique (ah toutes ces lettres assemblées !) et surtout récupérer les livres. Sinon ces personnages de contes légendaires disparaîtront à tout jamais pour les enfants du monde entier. Pas facile, surtout quand on a été miniaturisé par la jalouse Fée Carabosse !
Kerity, la maison des contes est à la fois un formidable film d’aventure et une superbe réflexion sur la mémoire des parents disparus, sur le patrimoine des contes, et une incitation définitive autant que ludique à la lecture. Ce soir-là, mes gamins ont été privés de Dragonball et on a lu un joli livre : Le Géant aux oiseaux, illustré par Rebecca Dautremer. Ils ont été ravis et ils ont fait de beaux rêves.