LA PRIÈRE
Du 21/03/2018 au 30/04/2018
OURS D'ARGENT DU MEILLEUR ACTEUR • FESTIVAL DE BERLIN 2018
Après une overdose, Thomas, 22 ans, est recueilli par un prêtre. Il lui propose d'intégrer une communauté religieuse isolée dans la montagne, le temps de la désintoxication et de reprendre pied avec une vie « normale ». L'accueil est strict, aucune distraction n'est permise ici : ni télévision, ni journaux, ni musique. Les pensionnaires ont l'interdiction d'être seuls et l'obligation de se plier aux règles de ce lieu, basées sur le travail et la prière. Dans ce microcosme se joue autre chose que la simple désaccoutumance à la drogue : la réappropriation d'une forme de confiance en soi et en les autres, une certaine idée de la foi, pas uniquement religieuse d'ailleurs. Car ils ne sont pas tous croyants, mais ils apprennent à se soumettre aux principes de la maison, à ses temps de prières et de chants, au partage et à la vie en communauté.
La thérapie – sans en avoir nécessairement le nom – se résume à être dans l'action pour lutter contre le désir, la facilité, la tentation (de la drogue mais plus largement de la dépendance) et ainsi reprendre conscience de son corps, assumer ses faiblesses, être soutenu et accepté malgré ses fragilités. Petit à petit, les résidents (ré)apprennent les valeurs fondamentales définies en psychologie mais dont la religion se fait le relais : la bienveillance, la sécurité, la réussite (fruit d'un certain effort), l'universalisme (qui se définit comme la prise de conscience de faire partie d'un tout et de la nécessité de prendre soin de son environnement autant que de soi)... Un ensemble de préceptes qui peu à peu définissent un cadre et placent des repères, imperceptiblement...
Cette communauté fonctionne comme une confrérie, au sens des « frères » qui se soutiennent dans les moments difficiles, tirant leur force de leur compréhension du mal pour l'avoir nécessairement vécu : chaque nouvel arrivant est confié à « un ange gardien », un autre membre chargé de l'accompagner dans les premiers moments – les plus difficiles – mais aussi pour la suite, quand il s'agit de se construire et que l'extérieur devient source à la fois de désir et d'angoisse.
Ne jamais occulter les difficultés et rester palpitant de bout en bout font la force de ce film. Malgré son titre, La prière n'impose sa religion ni au spectateur ni à ses personnages : chacun est libre de rester ou de partir, la seule contrainte est de se soumettre aux usages établis pour avoir la possibilité de vivre au sein du groupe. Les acteurs sont criants de vérité et de sincérité, particulièrement le jeune Anthony Bajon qu'on n'avait jamais vu dans un premier rôle mais dont la présence à l'écran est remarquable. Alliant fragilité enfantine à une forme de violence et d'intransigeance dans le regard, il traduit à la fois un vécu déjà marqué par la souffrance et une forme de candeur qui le rendent extrêmement attachant. Enfin ce film est absolument magnifique, ne serait-ce que par son décor : l'immensité des paysages de montagne joue un rôle essentiel dans ce parcours initiatique vers une forme de sérénité quotidienne et ordinaire.