Lamb
Du 15/06/2016 au 18/01/2022
L’enfant enfouit sa main dans la fourrure, l'animal est tout contre lui, chaud, rassurant, il sent son cœur qui bat la chamade à chacun de leurs pas qui vont en cadence, inséparables. Ephraïm et Chuni, le garçon et sa brebis. C’est une amitié comme seule l’enfance sait les faire naître, une amitié à la vie à la mort à laquelle les adultes ne peuvent rien comprendre… Ici sans doute encore moins qu’ailleurs, sur ces terres magnifiques et sauvages d’Ethiopie où l’homme doit arracher au sol sa pitance, dans la peine et la souffrance. Un animal est avant tout une richesse, une viande qui nourrit, pas un compagnon de route, ni un confident, ni un complice. Mais Ephraïm a su imposer à son entourage la douce et tendre relation qui l’unit à sa brebis. Il faut dire que Chuni appartenait à sa mère et sa mère vient de mourir… Avancer dans la vie avec Chuni, c’est un peu comme tenir encore un peu la main de celle qui le rassurait, le consolait, le berçait.
Mais les temps sont durs. La pluie n’est pas venue, le sol est sec, la famine guette. Il faut partir, quitter le village pour chercher du travail ailleurs, là où les cieux seront peut-être plus cléments. Ephraïm et son père partent, n’emportant rien car ils n’ont rien, rien excepté Chuni.
Confié à des parents éloignés, Ephraïm va devoir s’adapter à sa nouvelle vie, une vie qui ne lui plaît pas : pas assez de place pour rêver, plus de longues promenades, plus assez de temps collé contre sa brebis. C’est un garçon, on veut faire de lui un homme… Alors il va devoir travailler et le travail d’un homme, c’est la terre… Ephraïm, lui, préfère la compagnie des femmes et il est bien plus doué pour confectionner de délicieux beignets que pour manier la charrue.
Drôle de gamin, qui n’est nulle part à sa place mais qui garde, en dépit des vents contraires, suffisamment de force et de volonté pour surmonter sa solitude, sa peine et ses déboires. Car il n'est pas au bout de ses peines : bientôt, c’est jour de fête et la tradition veut que l’on sacrifie une bête…
Portrait initiatique tendre et doux d’un gamin aux grands yeux tristes confronté à la rudesse du monde des adultes, Lamb est une superbe histoire d’amitié. Mais c’est également la rencontre avec un pays dont on n’imaginait même pas qu’il pouvait être aussi beau… Et il est aussi question de la place des femmes dans une société largement patriarcale qui veut que les filles soient très vite mariées pour devenir à leur tour mères, puis épouses et cuisinières…
Pourtant, il y a un véritable espoir, incarné par le personnage de la cousine d’Ephraïm, gamine aux cheveux rebelles qui refuse d’être belle pour son prétendant désigné et qui préfère aux tâches ménagères la lecture des journaux. Les yeux pleins de rêves et d’envie d’ailleurs, elle et Ephraïm symbolisent peut-être le changement d’une société où il est possible, aussi, de rêver en cinémascope.