UNE VIE DIFFICILE

COPIE NUMÉRIQUE RESTAURÉE

Silvio, étudiant idéaliste, rejoint la Résistance pendant la guerre. Traqué par les fascistes, il se retrouve pendant trois mois choyé dans un vieux moulin, entouré de salamis et enlacé par la jeune Elena. Il finira par l'épouser après la Libération, alors qu'il est devenu journaliste de gauche. Une vie difficile dépeint les désillusions de ce citoyen intègre, de la guerre au début des années 1960, et, parallèlement, les problèmes de l'Italie jusqu'au boom économique. C'est le portrait d'un pur – dénué du « sens des réalités », comme le lui dit son patron – qui va tout perdre par fidélité à ses idéaux.

Cette évocation grinçante des malheurs d'un anticonformiste est rythmée de scènes homériques, parmi lesquelles une audition pour un emploi honorable qui tourne au fiasco, et un gag à répétition à partir de l'art de manier une bouteille d'eau de Seltz. La plus belle est un dîner chez des aristocrates, le soir du référendum de 1946 : « Monarchie ou république ? ». Seul avec son épouse à rester à table après la proclamation des résultats, Silvio se goinfre en faisant fi des bonnes manières tandis que le domestique vient lui remplir sa coupe de champagne. C'est tout le talent de cette comédie « à l'italienne » : on y rit des candeurs du héros d'une part, on y assiste aux mutations politiques, sociales et culturelles du pays d'autre part. À la fois drolatique, poignant et d'une extrême actualité, Une vie difficile illustre magnifiquement la fameuse réplique de Nous nous sommes tant aimés d'Ettore Scola : « Nous voulions changer la société, c'est la société qui nous a changés ».

(D'après Jean-Luc Douin • Le monde)