LE DISCIPLE
Du 23/11/2016 au 20/12/2016
SÉLECTION OFFICIELLE, UN CERTAIN REGARD • FESTIVAL DE CANNES 2016
Il est beau, jeune, charismatique. Les filles le regardent, les garçons aussi, mais voilà que Veniamine vire chrétien. Pas du genre à tendre la joue quand on le frappe. Non : sa foi est folle, délirante, terrible, vengeresse. À coup de citations de la Bible, apprises par cœur et crachées à la gueule de ceux qui tentent de le raisonner, il fulmine, rugit, condamne. Qui ? Les faibles, les lâches, les tièdes. Contre sa mère qui a péché contre l’enseignement du Christ en divorçant. Contre les filles qui s’exhibent à la piscine en « bikinis ». Contre les homos qui se cachent, et contre ceux qui osent vivre leur vice.
Le pire chez cet ado, fascinant mais bête à manger du foin – à croire notamment qu’il pourra, par sa foi, guérir un estropié – , c’est ce qu’il révèle d’une société russe au moins aussi effrayante que lui. Où l’on enseigne aux élèves que Staline, en dépit de quelques excès, eût été, aujourd’hui, « un excellent manager ». Où les théories de Darwin, certes un homme important, pourraient souffrir d’être contredites. Où l’antisémitisme veille toujours dans l’ombre, prêt à s’enflammer à la moindre étincelle. Une seule prof tente de lui résister dans ce qui devient très vite un duel à mort. « Il faut utiliser les mêmes armes que lui », et elle s’y emploie avec une rage aussi forte que celle de son adversaire. Et ce n’est pas l’ado, subitement dérouté par ce détracteur, qui la terrasse, mais les autres, tous les autres, aussi pleutres et bornés que l’illuminé qu’ils se mettent, soudain, à défendre.
Mise en scène splendide, faite de plans séquence et d’audaces visuelles, Le disciple terrifie et subjugue…
(D’après Pierre Murat • Télérama)